Les cosmétiques font partie intégrante de notre vie quotidienne depuis des milliers d'années. Les parfums, les eaux de Cologne et les lotions après-rasage contiennent des substances odoriférantes, les produits utilisés en cosmétique en contiennent aussi, tels que  les déodorants, les shampoings, les fixatifs, les savons, les lotions pour le corps, la poudre pour bébés, les écrans solaires, d’autres produits utilisés dans la vie courante tels  que les détergents à lessive, les assouplissants, les pâtes à dentifrices ainsi que d’autres produits d’hygiène.

Ces substances odoriférantes se retrouvent même dans les produits sur lesquels figure la mention « inodore » ou « sans fragrance », ils contiennent souvent une « fragrance de masquage » pour dissimuler l’odeur désagréable d’autres ingrédients (1).

En outre, de nombreux produits contiennent des extraits botaniques parfumés qui ne sont pas indiqués comme des fragrances sur l’étiquette. L’aromathérapie et la massothérapie sont en vogue de nos jours  et exposent les clients et les praticiens à un contact répété avec des huiles essentielles très parfumées.

Par conséquent, les réactions allergiques aux produits cosmétiques sont de plus en plus signalées (2).

Aspects chimiques

Tableau 1 : Concentrations des fragrances dans les produits de consommation

 Parfum                                                20 % - 40 %

 Eau de toilette                                       5 % - 30 %

Eau de Cologne                                       4 % - 5 %

 Assouplissant en feuilles                              ± 7 %

Produit nettoyant

pour salles de bains                                       ± 5 %

Shampoing                                            0,5 % - 4 %

Désodorisant                                         0,5 % - 2 %

Savon                                                    0,5 % - 2 %

Lotions pour le corps                             0,3 % - 5 %

Maquillage et rouge à lèvres                              1 %

Détergents à lessive et à vaisselle          0,1 % - 1 %

Fragrance de masquage                                   0,1 %

La concentration des substances odoriférantes varie de 20 % dans un parfum à < 0,1 % dans une fragrance de masquage (tableau 1). Malgré le grand nombre de substances que l’on peut utiliser dans un parfum, les allergènes potentiels n’existent que dans un nombre limité de classes chimiques. Parmi celles-ci, les aldéhydes, les cétones et les cétones/aldéhydes α, ß insaturés prédominent (3).

En Europe, le comité scientifique de la sécurité des consommateurs (SCCS) a annoncé qu’environ 16% des patients atteints d'eczéma sont sensibilisés aux ingrédients parfumants, 1% à 3% de la population est allergique à ces ingrédients (4).  Ces résultats sont tout à fait superposables à une autre étude conduite aux Etats-Unis par le Groupe d'étude la "North American Contact Dermatitis " qui montrait une incidence de 14% d'allergie aux parfums sur les 3000 patients testés.

Cependant les études accessibles indiquent qu'un niveau général d'exposition allant jusqu'à 0,8 µg / cm2 (0,01% dans le produit cosmétique) doit être évité par des consommateurs (5).

Les signes cliniques :

Dermatite de contact allergique

La dermatite de contact allergique atteint fréquemment le cou, les zones rétro-auriculaires, le visage et les paupières (6). La voûte axillaire est souvent touchée en raison de l’usage de déodorants. Cependant, la sueur peut éliminer certaines des substances nocives. La dermatite de contact allergique sur la partie interne des poignets et le pli du coude causée par l’application de parfum peut simuler une dermatite atopique. Des lésions ano-génitales ont été signalées à la suite d’un contact avec des produits d’hygiène personnelle et du papier hygiénique humide (7). Les mains sont souvent touchées, car la plupart des produits parfumés entrent en contact avec les mains avant d’autres régions (8,9).              

La photodermatite de contact

Ces réactions sont causées par le contact  des rayonnements solaires et une molécule appelée « chromophore » qui absorbe les ultraviolets, le plus souvent les UVA, et peuvent être phototoxiques ou photoallergiques. Elle se manifeste au début  par un érythème suivi d’une intense pigmentation. Les lésions se présentent habituellement comme des macules pigmentées en larme sur les côtés du cou (dermatite en breloque). Des rapports initiaux ont attribué ces lésions au parfum "Shalimar de Guerlain", qui contenait de l’essence de bergamote. La bergamote est un petit agrume dont l’essence est riche en bergaptène, un agent photosensibilisant du type psoralène. L’essence de bergamote sans bergaptène, est utilisée actuellement en parfumerie.

Plus rarement, la photodermatite de contact de type photoallergique est causée par la coumarine, le baume du Pérou, la mousse de chêne ou d’autres extraits de lichen. Le musc ambrette, qui causait fréquemment une allergie de contact dans les années 1980, a été retiré du marché (10).

Figure 3 : réaction photonique à la bergamote

Dyschromies

La leucodermie périorale a été attribuée à la présence d’aldéhyde cinnamique dans une pâte dentifrice (11). L’hyperpigmentation, se manifeste fréquemment comme une pigmentation brun-gris, observée le plus fréquemment chez les femmes asiatiques. L’affection appelée mélanose de Riehl représente probablement une dermatite de contact pigmentée provoquée par des cosmétiques (12,13).

Figure 4: une femme atteinte d’une mélanose de Riehl

Urticaire de contact

Des réactions immédiates et de courte durée, caractérisées par des papules œdémateuses, un érythème et un prurit, sont fréquemment associées au baume du Pérou et à ses constituants (aldéhyde cinnamique, acide benzoïque, alcool benzylique, acide sorbique). Ces réactions peuvent être immunologiques  ou non immunologiques  (14).

Troubles respiratoires

Les parfums sont volatils et, par conséquent, en plus de l'exposition cutanée, un parfum expose également les yeux et les voies naso-respiratoires à des troubles. Il y a déjà 35 ans, on soupçonnait et confirmait plus tard que les parfums pouvaient induire ou aggraver des problèmes respiratoires, y compris des crises d’asthme. Actuellement, on estime que 2% à 4% de la population adulte est affectée par des symptômes respiratoires ou oculaires dus à de telles expositions. Les symptômes fréquemment rapportés sont les yeux secs, les démangeaisons ou les larmoiements, irritation nasale, congestion et éternuements, ainsi que des irritations de la bouche et de la gorge, l'essoufflement et la toux (15).

En pratique :

Penser aux agents parfumants, tels que les produits cosmétiques ou les détergents, en cas de troubles cutanés, oculaires ou respiratoire peut faire minimiser les risques d’aggravation de symptômes liés à ce type de produits.

La déclaration à la pharmacovigilance permettra de faire connaitre d’autres produits allergisants non encore connus à ce jour.

Bibliographie :

1- Scheinman PL. “ The foul side of fragrance-free products: What every clinician should know about managing patients with fragrance allergy ” J Am Acad Dermatol  1999; 41: 1020-4.

2- Scheinman PL. “ Prevalence of fragrance allergy" Dermatology  2002 ; 205:98-102.

3- Frosch PJ et coll. “ Further important sensitizers in patients sensitive to fragrances” Contact Dermatitis. 2002;47(2): 78-85.

4- (SCCS) SC on CS. Opinion on fragrance allergens in cosmetic products. (2012).

5- Marks JG et coll. “North American contact dermatitis group patch test results for the detection of delayed type hypersensitivity to topical allergens” J Am Acad Dermatol 1998 ; 38 : 911-8

6- Larsen W et coll. “ Fragrance contact dermatitis : A Worldwide Multicenter Investigation ” Am J Contact Dermatiti . 1996; (7 2): 77-83.

7- Groot AC. “ Contact allergy to moist toilet paper ” Contact Dermatitis .1991; 24:135-6.

8- Malten KE et coll. "Reactions in selected patients to 22 fragrance materials " Contact Dermatitis 1984 ; 11:1-10.

9- Buckley DA et coll.  "Contact allergy to individual fragrance mix constituents in relation to primary site of dermatitis " Contact Dermatitis 2000 ; 43 : 304-305.

10- Giovinazzo VJ et coll. "Photoallergic contact dermatitis to musk ambrette" Arch Dermatol  1981 ; 117 : 344-348.

11- Mathias CG " Perioral leukoderma simulating vitiligo from use of a toothpaste containing cinnamic aldehyde " Arch Dermatol 1980 ; 116 : 1172-1173.

12- Nakayama H et coll. "Pigmented contact dermatitis" Int J Dermatol  1976 ; 15: 673-675.

13- Serrano G et coll. "Riehl’s melanosis: Pigmented contact dermatitis caused by fragrances" J Am Academ Dermatol 1989 ; 21 : 1057-60.

14- Forsbeck M et coll. " Immediate reaction to patch tests to balsam of Peru "   Contact Dermatitis  1977 ; 3 : "201-5.

15- Elberling J. "Respiratory symptoms from fragrances and the link with dermatitis " Contact Dermatitis 2011 ; 23 : 429–436

 

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